- BRAENDLE Karen
- ARVEUX Patrick
- GERMANN Simon
- BULLIARD Jean-Luc
Evaluation de 20 ans d’activité du programme vaudois de dépistage du cancer du sein, 1999-2018
Abstract
Malgré une baisse de l’incidence et surtout de la mortalité, le cancer du sein reste le plus fréquent et le plus mortel chez la femme. Quelque 600 vaudoises sont touchées chaque année, 120 en décèdent. Le dépistage par mammographie demeure le seul outil de prévention avec un impact démontré sur la mortalité chez les femmes de 50 à 74 ans. Des évaluations indépendantes et régulières permettent de s’assurer que la qualité et l’efficacité d’un programme de dépistage répondent à des normes internationales.
Ce sixième rapport d’évaluation analyse 20 ans d’activité du programme vaudois de dépistage du cancer du sein, qui a été le premier programme organisé lancé en Suisse. Outre les indicateurs transversaux classiques permettant la comparaison des performances entres programmes aux niveaux national et international, ce rapport inclut une comparaison des performances sur différentes périodes ainsi que, pour la première fois pour un programme en Suisse, une perspective longitudinale. Les domaines évalués dans ce rapport sont l’activité, la participation, la qualité et l’efficacité du programme entre 1999 et 2018, avec un focus sur la période 2014-2018.
L’activité a augmenté de manière régulière depuis le début du programme, tendance qui s’est accentuée ces 5 dernières années. Les radiologues deuxièmes lecteurs interprètent un grand volume de mammographies dans le cadre du programme, satisfaisant largement les normes suisses de qualité. Le volume de lectures par radiologue premier lecteur est en hausse et atteint la norme suisse grâce aux mesures prises par la Direction du programme.
La participation au programme est globalement stable dans le temps et légèrement supérieure à la moyenne nationale avec une femme sur deux qui participe. Le taux de participation en première invitation croît depuis 2013. L’âge à l’invitation, le district de résidence et le résultat du dernier dépistage influencent la participation. Le taux de fidélisation élevé (85%) reflète la satisfaction des participantes et du corps médical avec le programme. L’analyse longitudinale montre trois profils principaux de participation: les non-participantes, les participantes régulières et une minorité de participantes occasionnelles. La couverture participative individuelle est de 90% pour les participantes régulières et de 50% pour l'ensemble des femmes invitées.
La qualité du programme satisfait les normes pour les mammographies de femmes qui reviennent au programme (tour incident), ce qui représente la majorité des lectures. Cependant, les taux de reconvocation et de faux-positifs sont trop élevés en première participation (tour prévalent), avec une fréquence quelque peu élevée de cancers d’intervalle dans la deuxième année après la mammographie. La qualité radiologique tend à se péjorer, surtout en tour prévalent. Sur 10 ans de participation, 20 à 25% des femmes se sont fait rappelées pour des investigations complémentaires et une femme sur 5 aura subi un résultat faux-positif. Les risques d’effets délétères du dépistage sont accrus pour les femmes qui ont commencé le dépistage après 2009.
L’efficacité du programme est stable dans le temps et atteint les normes européennes. Le profil pronostique des cancers dépistés est plus favorable que ceux des cancers d’intervalle et des cancers diagnostiqués par symptomatologie et comparable à celui des cancers détectés par dépistage opportuniste. Un intervalle de plus de 30 mois entre deux dépistages réduit significativement l’efficacité.
Les performances du programme se traduisent pour 1000 femmes qui participent pendant 20 ans par 688 femmes qui ne présentent aucune anomalie et 312 qui sont rappelées au moins une fois pour des investigations complémentaires. Parmi celles-ci, 56 femmes ont un cancer du sein (dont 13 de stade avancé) et 256 font l’expérience d’un résultat faux-positif. Une vingtaine de femmes sont diagnostiquées avec un cancer d'intervalle.
Trois recommandations accompagnent ce rapport :
- Diminuer les taux de reconvocation et de faux-positifs en tour prévalent
- Surveiller la fréquence des cancers d’intervalle
- Enregistrer les résultats des échographies complémentaires en cas de mammographie négative sur seins très denses et objectiver la lecture de la densité mammaire